mercredi 27 novembre 2013

Si l’on s’aime, la vie continue!


Dalal et son père Mounir


Depuis le début de ce projet, j’ai toujours gardé à l’esprit l’idée que les parcours de vie des ainés de la diversité sexuelle ne pouvaient pas suffire à transcrire une réalité trop souvent méconnue ou mal interprétée. Cette réalité a été aussi vécue (parfois supportée) par l’entourage de ces ainées. Leur témoignages me paraissent donc indispensables pour mieux comprendre les mécanismes de l’homophobie exercée et subie dans le cadre social mais surtout familial.

Voila pourquoi, dans le cadre de ce projet, je tends le micro aussi aux personnes de l’entourage des protagonistes ; fils de…, ex-femme de…
Il s’agit d’un exercice délicat. Ce n’est pas facile de s’exprimer publiquement sur ce que l’on ressent quand son père, sa mère, son ex-mari ou son ex-femme nous fait part de son homosexualité cachée ou refoulée. Ce n’est pas facile de dire sa difficulté à accepter ou pardonner.

Si je trouve particulièrement courageuses et courageux celles et ceux qui ont apporté à ce projet le témoignage de leur parcourt de vie, je pense que les témoignages de leur proches est aussi courageux sinon plus.

C’est dans ce contexte que j’ai rencontré la semaine dernière à Gatineau l’une des filles de Mounir, l’un des protagonistes de ce projet. Dalal (31 ans) c’est confié devant le micro durant une heure. Je vous révèle ici un court extrait de notre entretien, celui qui correspond à la dernière question que je lui ai posée.

Dalal, pourquoi as-tu accepté de témoigner pour ce projet ?

« J’ai accepté de témoigner parce que je fais excessivement confiance à mon père. Il m’a parlé de ce projet, du rôle qu’il y a joué. J’ai vu la vidéo. J’ai trouvé ça très émouvant. J’ai aimé la perspective avec laquelle les protagonistes sont présentés, en étant humains, pas en étant gais.
Si je peux faire quelque chose pour montrer que la vie n’est pas si dramatique après avoir prit un aussi grand risque (La sortie du placard de mon père)…
Notre situation est particulière mais je suis pas mal sure qu’il y a beaucoup de personnes qui se posent de questions et qui ont peur de faire le pas mais la vie continue ! Si l’on s’aime, la vie continue ! »

mercredi 20 novembre 2013

Le premier court-métrage du projet, diffusé en avant-première dans un petit village de l’Ardèche (France)





Vendredi 15 novembre a eu lieu à Alboussière dans le département de l’Ardèche une rencontre débat autour du thème : « Nuances d’amour ». Elle est organisée par un groupe des personnes de l’Ardèche qui ont pour objectif d’apporter à la vie de la campagne, d’autres manières de se rencontrer, d’échanger  autour des sujets touchant à l’amour dans le plus grand sens du mot. D’ailleurs, ce groupe s’appelle «si on parlait d’amour»


L’association CONTACT dans laquelle je suis bénévole depuis 12 ans a été approchée par ce groupe afin de discuter de ce que notre association pourrait leur apporter. Finalement, je leur ai proposé d’utiliser le court-métrage que j’ai réalisé dans le cadre de ce projet sur les ainés. Il a donc été projeté la semaine dernière  en avant-première devant une trentaine de personnes venues des villages environnants pour « parler d’amour »
 

Le court-métrage, qui aborde les sujets de l’amour entre hommes, l’acceptation de soit, le deuil, la solitude et la vieillesse à servi donc d’introduction à la soirée débat.


Malheureusement, je n’ai pas pu y assister puisque je me trouve encore à Montréal pour les besoins du projet mais selon « mes correspondants spéciaux » dépêchés sur place, l’accueil a été positif et encourageant.  Ce n’est pas dans l’habitude des habitants de ces vallées ardéchoises de se voir proposer des rencontres publiques pour parler de ces sujets. Il faut dire qu’aucune allusion à l’homosexualité n’était présente sur les documents de présentation de la soirée.

Quelqu’un a confié à l’un de « nos correspondants » : « J’ai beaucoup plus appris sur l’homosexualité avec ce petit documentaire de 12 minutes qu’avec le film « La vie d’Adèle » (Palme d’or au festival de Cannes de cette année).  Je le prends comme un compliment même si je n’ai la moindre prétention de comparer mon travail à celui du cinéaste Abdellatif Kéchiche.


Vous en saurez plus ici en temps utile sur ce court-doc que je viens de présenter à un concours en France.

lundi 30 septembre 2013

Présentation de Wilfrid

Wilfrid a 77 ans. Il vit seul à Montréal mais a vécu aussi à Ottawa et quelques années à Paris où il a fait une partie de ses études.
Il est séparé de sa femme depuis 40 ans. Ils sont vécu ensemble 11 ans et ont eu 2 enfants qui ont aujourd’hui 43 et 45 ans. La perte de son tout premier enfant à la naissance fut un grand traumatisme.
Wilfrid a travaillé comme enseignant en philosophie et théologie, mais il a été aussi danseur et musicien et comédien, métier qu’il exerce encore aujourd’hui de manière ponctuelle.

Il s’intéresse beaucoup aujourd’hui, comme par le passé, à la littérature, la philosophie, le théâtre, lit beaucoup et fait partie d’une chorale qui se produit régulièrement à Montréal.

Wilfrid se sait homosexuel depuis toujours mais a caché son orientation jusqu’à l’âge de 40 ans. Il n’a jamais parlé de son homosexualité à ses parents.

Dans sa vie, il a du faire face à quelques envies suicidaires et plusieurs périodes dépressives.


Une capsule vidéo sur Wilfrid est disponible sur la page CAPSULES VIDÉO

jeudi 12 septembre 2013

Passeur d’histoires par les mots

Cela fait bien trop de semaines que je ne prends pas le temps de vous tenir informés des actualités de ce projet et de mes activités plus ou moins en rapport avec celui-ci. Non, je n’étais pas en train de bronzer sur une plage bordée de cocotiers. D’ailleurs cette image soit disant idyllique est bien loin de me faire envie et si je ne mets pas en doute le pouvoir de l'huile de coco, mon carburant est tout autre, mon carburant c'est le travail et les autres…


Bref, la période estivale a été bien remplie par le travail et par « les autres » Évidement, quand on habite dans un endroit chaud et ensoleillé (en été), cela fait plaisir à partager, surtout avec ceux qui viennent de loin. Cette année : un québécois, un suisse, et une partie de ma famille espagnole ont partagé notre quotidien sans compter autres parisiens et amis qui habitent dans les environs. Tout cela pour vous introduire à mon travail de cet été.

Il m’arrive de me définir comme « passeurs d’histoires par l’image ». Je crois, en toute modestie, que cette expression défini assez bien mon travail.

Le projet dont on parle dans ce blogue illustre bien cette manière de définir mon travail. C’est un projet qui me demande en même temps d’être photographe, preneur de son, vidéaste, scénariste et monteur, et je ne tiens pas compte du travail de recherche de financement, de promotion et de recherche sociologique. Recherche sociologique ??

Sans y avoir pensé vraiment au départ, j’ai compris à travers de commentaires qu’il y a bien quelque chose de l’ordre de la recherche dans ce projet qui cherche précisément, à travers des témoignages à raconter une réalité des ainés de la diversité sexuelle au Québec. Une bonne partie du temps consacré à ce projet est bien dédiée à l’analyse des témoignages et à la recherche de corrélations que s’y dégagent. Ce travail est aussi passionnant que nécessaire dans ma fonction de « passeur » afin que les vies racontées par les protagonistes soient perçues et comprises comme des histoires différentes et en même temps reliées par beaucoup d’aspects qui feront du projet UN TOUT.

Je portais déjà d’une certaine manière l’habit du chercheur sans le savoir, ce qui n’a pas échappé à Michel Dorais (Professeur et chercheur à l’École de service social de l’Université Laval, où il donne notamment les cours «Diversité sexuelle et intervention sociale» et «Prévention et services sociaux». Il a écrit une quarantaine des livres, dont : Mort ou fif, La peur de l'autre en soi, Éloge de la diversité sexuelle, Petit traité de l'érotisme, Ça arrive aussi aux garçons, l'abus sexuel au masculin et son tout dernier, La sexualité spectacle.) J’ai rencontré Michel la première fois en mai 2012 à son bureau de l’université Laval à Québec afin de lui parler de mon projet documentaire sur les ainées et je suis sorti de ce même bureau une heure plus tard avec une proposition pour être co-auteur avec Michel Dorais et avec Annie Vaillancourt (travailleuse sociale et consultante en communication) de leur prochain livre, une recherche sociologique sur les jeunes québécois (14-21 ans) de la diversité sexuelle. Quelques semaines plus tard, je me suis retrouvé avec Michel et Annie autour d’une table à apporter les derniers détails du questionnaire qui allait servir à cette enquête.  Je venais d’intégrer l’équipe de Michel comme collaborateur-chercheur et comme co-auteur. Moi, qui n’ai jamais fait d’études universitaires, j’étais bien loin d’imaginer quelques jours plus tôt en rentrant dans le bureau de Michel à l’université que tant d’efforts sur le projet des ainés homosexuels pourraient m’amener sur le chemin de l’écriture et de la recherche.

Mon travail d’analyse et d’écriture a commencé en début d’année mais c’est cet été que je me suis consacré à 100% à l’écriture des deux chapitres que je m’étais engagé à écrire. Par ailleurs, j’ai réalisé la plupart des graphiques et schémas explicatifs du livre ainsi que la couverture. C’est chose faite maintenant. Le livre se trouve maintenant en phase de correction et sortira au Québec au printemps prochain.

Sans fausse modestie, je suis assez content de mon travail. Mon expérience avec le projet sur les ainés a été fort utile dans mon travail d’écriture, mais surtout d’analyse. Il a été particulièrement intéressant de comparer ce que les ainés disent de leur vie et ce que les jeunes québécois de la diversité sexuelle nous disent aujourd’hui. C’est la première étude de cette envergure sur le vécu de ces jeunes au Québec et on espère apporter avec notre travail un éclairage nouveau fort utile aux autorités sanitaires, sociales et d’enseignement, à tous ceux qui travaillent de prés où de loin avec les jeunes québécois et aux jeunes eux-mêmes.

Évidement, je reviendrai sur ce travail et vous tiendrai au courant de la parution du livre et des présentations qui seront faites en public et dans les médias.
Je terminerai avec l’explication du titre de cet article mais vous l’aurez déjà deviné… Michel Dorais a trouvé une belle manière de me présenter dans l’introduction du livre : Il écrit : « Manuel Mendo, passeur d’histoires par l’image (quand il est photographe) et par les mots (quand il est chercheur) »